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Métamorphoses - Chapitre 1 : Mya

vendredi 22 novembre 2019, par Sylvie Pichon

Lorsque Sam et Mya arrivent à l’internat de leur nouveau collège, ils espèrent que cet établissement élitiste, remplis de bons élèves comme eux, leur permettra de s’épanouir enfin.
Malheureusement, leurs nouveaux camarades sont surtout des enfants gâtés ; emplis de préjugés et peu disposés à accepter ces deux outsiders issus de familles modestes. Ils leur font vivre l’enfer.
Pourtant, les quatre ou cinq élèves "stars" du collège, beaux, athlétiques, intelligents et charismatiques semblent différents et pourraient bien cacher un sombre secret...


Jamais je n’aurais dû mettre tous ces livres dans ma valise, mais je ne pouvais pas me douter que l’internat de mon nouveau collège serait au deuxième étage ! Ma valise pèse des tonnes et je ne sens déjà plus mon bras au palier du premier étage, celui des garçons. Je trouve incroyable qu’on nous ait logées au second alors que de toutes évidence les filles ont les bagages les plus lourds. En tout cas ça a l’air d’être le cas des jumelles au-dessus de moi. Mais elles au moins n’ont pas eu honte d’emmener leurs parents qui trimbalent leurs sacs. Personnellement, me faire appeler « Miam » devant tout le monde, non merci !
Un beau garçon à la peau brune et aux incroyables yeux verts s’approche de moi :
- « Tu as besoin d’aide ? En principe, les garçons n’ont pas le droit de monter, mais je pense qu’on peut faire une exception pour la rentrée… » Le tout accompagné d’un grand sourire qui me fait rougir jusqu’aux oreilles.
- « Non merci, je bafouille, je vais me débrouiller… »
Il hausse ses larges épaules, toujours souriant, et je reprends mon impossible ascension d’un air que j’espère décidé. Au bout de dix marches, je me maudis d’avoir refusé cette offre généreuse, mais les beaux garçons me rendent nerveuse.
Arrivée à l’étage, je suis en nage. Je vérifie vite fait en soulevant un bras que je ne sens pas trop la transpiration et croise le regard des deux blondes qui viennent de dire au-revoir à leur parents et qui éclatent de rire exactement en même temps et sur le même ton. Flippant … Comble de malchance, elles entrent d’un air amusé dans la chambre n°1, qui est aussi la mienne. Je soupire. Je sens que je vais encore me faire des amies… Quand j’entre à mon tour, les jumelles sont en train d’installer leurs affaires sur les deux lits du fond, ceux proches des fenêtres, avec leur coin bureau en pleine lumière. Je ne peux pas leur en vouloir, j’aurais fait le même choix. Mais on aurait pu en discuter entre nous, non ?
Une fille ravissante, aux cheveux blond platine et aux immenses yeux violets entre à son tour.
- « Bonjour, me dit-elle en me tendant une longue main diaphane, Rose. »
Il me faut quelques longues secondes pour réaliser que c’est son prénom et non la couleur de la chambre qu’elle énonce d’un ton froid et pour lui tendre la main en retour.
- « Eeuuh… Mya… » Je bredouille gauchement, en espérant qu’elle attribuera ma couleur pivoine et mon front moite à l’effort de la montée.
C’est fou, les filles parfaites me rendent encore plus stupide que les beaux garçons. Comme celui qui l’escorte et pose ses deux énormes valises (sans rire : je ne savais même pas qu’un tel format existait !) dans l’entrée. Il salue les deux blondes et moi d’un signe amical et d’un sourire plein de dents blanches puis claque une bise à Rose.
- « A tout à l’heure, Rosie, on se voit tous pour le déjeûner ! » Sur cette promesse, il tourne les talons sans attendre sa réponse, pressé de quitter l’étage « interdit aux garçons », comme il est précisé dans le règlement intérieur qu’on nous a fait signer à l’inscription. Apparemment, il s’appelle Chris.
Rose se présente avec la même politesse formelle à nos deux camarades de chambre, Maud et Jade, qui se montrent avec elles d’une politesse qui sens l’hypocrisie, puis avec une aimable froideur, elle fait une proposition qui nous surprend toutes :
- « Et si on tirait nos places au sort ? J’ai une petite appli tout à fait commode pour ça sur mon téléphone… Les décisions justes favorisent les relations harmonieuses, vous ne croyez pas ? »
Les deux autres acquiescent avec un enthousiasme qui sonne faux. Mon sourire narquois n’échappe à personne. Si les yeux violets de Rose sont impénétrables, les deux regards des jumelles, d’un gris foncés atypique, me fusillent. C’est probablement la seule chose originale, chez elles. Le reste est totalement conforme à ce qu’on peut attendre de filles branchées et fortunées : cheveux blonds cendrés dont les mèches s’effilent impeccablement sur leurs épaules, visages harmonieux et pointus savamment maquillés, blouses soyeuses sans manches sur jeans slims déchirés aux bons endroits, Adidas blanches avec un patch au talon assorti à leur haut, chacune dans une teinte différente. Je préfère tellement l’élégance simple de Rose ! Yeux simplement surlignés d’un trait noir, petite robe blanche en dentelle à manches courtes, sandales compensées argentées, quelques bracelets argent et un pendentif goutte d’eau en améthyste, assorti à ses yeux : elle est le parfait modèle de la jeune fille moderne et romantique à la fois… Enfin, dans le style glacial.
Joignant le geste à la parole, elle pianote gracieusement sur son téléphone et rentre nos prénoms avant de faire tourner une roue de la fortune virtuelle sous nos yeux attentifs. Maud devient verte et je ne peux m’empêcher de faire une petite grimace de déception.
- « Tu es sûre que c’est pas truqué ? » Interroge-t-elle d’un ton acide.
- « Oui, réplique Rose froidement, ce n’est pas moi qui l’ai créée… Mais ta sœur peut toujours échanger avec toi, si tu préfères… »
- « Non merci, j’ai besoin de lumière pour me maquiller », rétorque Jade, sans appel.
- « Tu as l’air déçue, Mya. Tu as besoin de lumière toi aussi ? » M’interroge Rose qui m’observe calmement depuis le début.
- « C’est que je lis et que je dessine beaucoup… et je n’ai pas une très bonne vue. Mais ce n’est pas grave… J’allumerai la lampe de bureau… » Je me maudis une fois de plus d’être aussi émotive et empotée.
- « Vraiment ?prends ma place, alors, si tu veux. J’ai une excellente vue, ça ne fera aucune différence pour moi ! »
- « Oui, et bien moi aussi, j’en ai besoin. » Affirme sèchement Maud en me jetant un air méchant.
- « Désolée, les problèmes de vue sont prioritaires sur les problèmes esthétiques, rétorque Rose, nullement impressionnée. Allez Mya, c’est décidé, va t’installer au fond à gauche, c’est là que tu auras la meilleure lumière pour dessiner. Si c’est ok pour toi, Jade ? » Il est clair à son ton ferme qu’aucune contestation n’est attendue.
Si elle n’était pas aussi distante, je lui en taperais bien cinq, mais il est évident que ce genre de familiarité ne serait pas à son goût. Je me contente donc de lui sourire avec reconnaissance et elle hoche très légèrement la tête en réponse. Son regard vire au sibérien lorsqu’elle entend la réponse de Jade, à peine marmonnée, pourtant :
- « Hum, j’éviterai de regarder vers la gauche, alors. »

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